À qui l’argent? Les demandeurs sous le régime du privilège des constructeurs et des fournisseurs de matériaux et les créanciers dans une faillite – Priorités au N.-B. et en N.-É.
La Loi sur le privilège des constructeurs et des fournisseurs de matériaux du Nouveau-Brunswick et la Builders’ Lien Act de la Nouvelle-Écosse contiennent toutes deux des dispositions selon lesquelles certaines sommes que reçoivent les propriétaires, constructeurs et entrepreneurs sont réputées être détenues en fiducie pour ceux qui occupent les échelons inférieurs. Les sommes doivent être détenues en fiducie pour la protection de ceux à qui elles sont dues en échange des services qu’ils rendent ou des matériaux qu’ils fournissent dans le cadre du projet de construction.
Selon la législation, la société qui détient des fonds en fiducie manque à son obligation fiduciaire lorsqu’elle affecte ceux-ci à un usage non autorisé aux termes de la fiducie. La législation prévoit également que les dirigeants et les administrateurs de la société peuvent être tenus personnellement responsables du manquement à l’obligation fiduciaire.
De récentes décisions issues de l’Ontario et de l’Alberta abordent la question des priorités applicables lorsque la société qui détient des fonds en fiducie déclare faillite. La question à trancher par les tribunaux était celle de savoir si les fonds détenus en fiducie devraient être versés aux créanciers de la société en faillite ou, subsidiairement, aux bénéficiaires du fonds en fiducie.
Dans les deux instances, le tribunal s’est prononcé en faveur des créanciers du failli. Les tribunaux ont conclu que le droit fédéral a préséance sur le droit provincial.
Bien que la Loi sur faillite et l’insolvabilité contienne une disposition selon laquelle tout bien détenu en fiducie par le failli n’est pas à inclure dans ses actifs aux fins de déterminer ce qui est à la disposition des créanciers, les tribunaux ont jugé que les fiducies établies sous le régime provincial du privilège des constructeurs et des fournisseurs de matériaux ne remplissent généralement pas les critères d’une fiducie traditionnelle ou de common law et qu’elles ne constituent donc pas des fiducies au sens de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité.
La décision de la Cour de l’Alberta a été portée en appel, mais l’appel n’a pas encore été entendu.
Considérations
Il est important de se rappeler que les dirigeants et les administrateurs peuvent quand même être tenus personnellement responsables d’un manquement à l’obligation fiduciaire malgré la faillite de la société fiduciaire. Les bénéficiaires de la fiducie peuvent se trouver dans l’impossibilité de réclamer les sommes dues par la société en faillite, mais ils pourraient bénéficier de remèdes en leur qualité personnelle à l’encontre des dirigeants et des administrateurs.
Pour ceux à qui des sommes sont dues par une société dont la situation financière paraît instable, ces décisions mettent l’accent sur l’importance de protéger tout droit fondé sur un privilège et, le cas échéant, de rechercher les autres sources de paiement possibles, comme un cautionnement ou une lettre de crédit.